Affable,
Simon Guédé Diouf est un instituteur chevronné qui a embrassé le métier de
l’enseignement en Octobre 1963. Auparavant il avait servi dans le privé. Aujourd’hui,
à la retraite depuis 2001, le sexagénaire se plait à dire que les travaux
champêtres lui permettent de maintenir sa forme physique. Ainsi, après 38 ans
de nobles et loyaux services rendus à la nation, il est considéré par ses compatriotes de Fadiouth
comme l’un des intellectuels les plus respectés...
C’est en allant à son domicile sis au quartier
Fassar de Fadiouth que nous l’avons rencontré. Simon Guédé Diouf, un sexagénaire,
la taille moyenne-1,68 mètre-, une démarche leste et majestueuse avec une mine qui ne reflète pas son âge. L’on peut
lire sur son visage lisse en forme arrondie, l’image d’un patriarche au service
de sa communauté. Simon est un instituteur à la retraite considéré par ses amis
comme un sage cultivé et intelligent à la fois, tant il possède une mémoire
tenace qui peut retracer l’histoire de sa localité. Père de 8 enfants, (5 garçons et 3 filles) il est aux
yeux de ses compatriotes, un homme généreux et ambitieux qui conçoit la
retraite comme le prolongement de la vie active.
Avec son teint couleur d’ébène, s’affiche sur ses lèvres un sourire
resplendissant. Son chapeau torpédo posé soigneusement sur sa tête cache ses
cheveux blancs et une partie de son large front. Vêtu d’un pantalon de couloir
noir assorti d’une chemise manche courte et multicolore, il tenait dans sa main
droite son téléphone portable. Ses yeux
étincelants, le nez camus avec une bouche souriante, le vieil homme a des
mains douces.
Son emploi du temps est bien défini. Enraciné dans
sa tradition sérère qui incarne le culte du travail, Guédé du nom de sa mère
qui lui est donné depuis la naissance, n’a pas rompu les amarres avec le labour
de la terre. « Je vais toujours au
champ pour maintenir ma forme physique » raconte-t-il. Assis sous le hangar où devisent
quotidiennement les anciens du village de Fadiouth, non loin du pont François
Bopp reliant l’ile à Joal, il retrace ses 38 ans de nobles et loyaux services
rendus à la nation, dans le domaine de l’éducation. Un lieu symbolique en
milieu sérère qui abrite les grandes
décisions de la localité. Ses souvenirs remontent à 1963, début de sa riche et
brillante carrière.
Déjà le jeune instituteur chargé d’école (l’établissement
ne comptait qu’une seule classe) qu’il était
pendant 5 ans à Ndiago dans le département de Gossas, a beaucoup œuvré
pour amener à l’époque les parents à inscrire leurs enfants. Simon était très
dynamique et avait décidé de créer une seconde classe. Un jour se rappelle
t-il, « J’ai demandé à un père de famille
d’inscrire son enfant. Il m’a répondu que ce serait de le jeter dans un feu
ardent ». Mais en bon pédagogue ayant pour mission d’instruire et
d’éduquer, M. Diouf avait utilisé une
métaphore pour le ramener à de meilleurs sentiments. Il lui avait dit: « Pour aller à la Mecque mon ami, celui
qui t’a établi tes papiers est quelqu’un qui a bien fréquenté l’école, sinon il
n’aurait pas pu le faire».
Djilor Sine est une autre localité qui l’a marqué.
Il a servi pendant 5ans dans ce village du père du premier président de la
République du Sénégal Léopold Sédar Senghor. A l’époque presque tous les
enfants y étaient à l’école.
Les vagues de la lagune s’agitent et un vent frais
souffle sous le hangar. Son téléphone sonne. Simon s’excuse courtoisement avant
de décrocher. Au bout du fil, un correspondant qui s’exprime en sérère. Un
parent ? Un ami ? Quelques secondes après, il raccroche. « La retraite pour moi, ce n’est pas
seulement le retour à la terre, mais aussi consacrer un peu de temps aux
loisirs qui adoucissent l’âme confie t-il. Mon passe temps favori comme chez tous les Fadiouthiens reste la
pêche à l’épervier. Je m’adonne également au jeu de dames ici à cette place en
compagnie de mes amis de la même classe d’âge ». Son plat préféré n’est
pas le « thiéré ndoune » (couscous à la sauce) chez les sérères, mais plutôt du « thiéb souwaire »
(le riz à la viande avec une sauce d’oignon et des crudités).
L’enseignement n’avait pas été la première activité
de Simon Guédé. Jeune chrétien, il explique : « j’ai été recruté comme secrétaire au curée de la paroisse de
Sacré cœur en 1962, mais pour quelques mois. J’ai offert également mes services
dans une armurerie du nom de Gambetta à l’époque ». Auparavant, il
avait fait ses premiers pas à l’école élémentaire Lamoise, puis cap au collège
de la petite côte et enfin à Saint Michel où il a décroché son brevet d’Etudes
du premier cycle (Bepc).
Pensif, les yeux fixés sur un même endroit, il offre
une vague de ressemblance à un grand père qui raconte ses beaux jours à ses
petits enfants attentifs. Les images du passé semblent défiler sous ses yeux et
c’est comme si une créature invisible lui dictait les souvenirs de sa tendre
jeunesse.
En 1978 Simon retourne auprès des siens à Fadiouth. Depuis cette date
jusqu’en 1994, il consacre tout son
temps à inculquer le savoir à la jeune génération à l’école Joachim Fodé Ndiaye
de Joal. Pour terminer en apothéose « en
2001, j’ai pris ma retraite pendant que j’étais surveillant au Lycée Léopold
Sédar Senghor de Joal » narre –t-il. Mais aujourd’hui comme hier, le
vieil homme affiche sa volonté de servir encore son pays. « Ma plus grande satisfaction morale demeure la réussite de plusieurs
de mes élèves dans la vie : il y’ en a qui sont devenus des enseignants,
des journalistes, des cadres supérieures et j’en passe » se réjouit-il.
A la jeune génération, il ne cesse de
prodiguer des conseils et affirme que « ceux qui vivent, ce sont ceux qui
luttent. Redoublez d’efforts pour réussir dans la vie, car il ne faut jamais se
décourager ».
Mahamadou
Lamine BARRO
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