mardi 16 juillet 2013

Simon Guédé Diouf Instituteur en retraite à Joal-Fadiouth : « Les loisirs adoucissent l’âme »



Affable, Simon Guédé Diouf est un instituteur chevronné qui a embrassé le métier de l’enseignement en Octobre 1963. Auparavant il avait servi dans le privé. Aujourd’hui, à la retraite depuis 2001, le sexagénaire se plait à dire que les travaux champêtres lui permettent de maintenir sa forme physique. Ainsi, après 38 ans de nobles et loyaux services rendus à la nation,  il est considéré par ses compatriotes de Fadiouth comme l’un des intellectuels les plus respectés...


C’est en allant à son domicile sis au quartier Fassar de Fadiouth que nous l’avons rencontré. Simon Guédé Diouf, un sexagénaire, la taille moyenne-1,68 mètre-, une démarche leste et majestueuse avec une  mine qui ne reflète pas son âge. L’on peut lire sur son visage lisse en forme arrondie, l’image d’un patriarche au service de sa communauté. Simon est un instituteur à la retraite considéré par ses amis comme un sage cultivé et intelligent à la fois, tant il possède une mémoire tenace qui peut retracer l’histoire de sa localité. Père de 8 enfants, (5 garçons et 3 filles) il est aux yeux de ses compatriotes, un homme généreux et ambitieux qui conçoit la retraite comme le prolongement de la vie active.

Avec son teint couleur d’ébène,  s’affiche sur ses lèvres un sourire resplendissant. Son chapeau torpédo posé soigneusement sur sa tête cache ses cheveux blancs et une partie de son large front. Vêtu d’un pantalon de couloir noir assorti d’une chemise manche courte et multicolore, il tenait dans sa main droite son téléphone portable. Ses yeux  étincelants, le nez camus avec une bouche souriante, le vieil homme a des mains douces.

Son emploi du temps est bien défini. Enraciné dans sa tradition sérère qui incarne le culte du travail, Guédé du nom de sa mère qui lui est donné depuis la naissance, n’a pas rompu les amarres avec le labour de la terre. « Je vais toujours au champ pour maintenir ma forme physique » raconte-t-il.  Assis sous le hangar où devisent quotidiennement les anciens du village de Fadiouth, non loin du pont François Bopp reliant l’ile à Joal, il retrace ses 38 ans de nobles et loyaux services rendus à la nation, dans le domaine de l’éducation. Un lieu symbolique en milieu sérère qui abrite  les grandes décisions de la localité. Ses souvenirs remontent à 1963, début de sa riche et brillante carrière. 

Déjà le jeune instituteur chargé d’école (l’établissement ne comptait qu’une seule classe) qu’il était  pendant 5 ans à Ndiago dans le département de Gossas, a beaucoup œuvré pour amener à l’époque les parents à inscrire leurs enfants. Simon était très dynamique et avait décidé de créer une seconde classe. Un jour se rappelle t-il, « J’ai demandé à un père de famille d’inscrire son enfant. Il m’a répondu que ce serait de le jeter dans un feu ardent ». Mais en bon pédagogue ayant pour mission d’instruire et d’éduquer, M. Diouf  avait utilisé une métaphore pour le ramener à de meilleurs sentiments. Il lui avait dit: « Pour aller à la Mecque mon ami, celui qui t’a établi tes papiers est quelqu’un qui a bien fréquenté l’école, sinon il n’aurait pas pu le faire».
Djilor Sine est une autre localité qui l’a marqué. Il a servi pendant 5ans dans ce village du père du premier président de la République du Sénégal Léopold Sédar Senghor. A l’époque presque tous les enfants y étaient à l’école.



Les vagues de la lagune s’agitent et un vent frais souffle sous le hangar. Son téléphone sonne. Simon s’excuse courtoisement avant de décrocher. Au bout du fil, un correspondant qui s’exprime en sérère. Un parent ? Un ami ? Quelques secondes après, il raccroche. « La retraite pour moi, ce n’est pas seulement le retour à la terre, mais aussi consacrer un peu de temps aux loisirs qui adoucissent l’âme confie t-il.  Mon passe temps favori comme chez tous les Fadiouthiens reste la pêche à l’épervier. Je m’adonne également au jeu de dames ici à cette place en compagnie de mes amis de la même classe d’âge ». Son plat préféré n’est pas le « thiéré ndoune » (couscous à la sauce) chez les sérères,  mais plutôt du « thiéb souwaire » (le riz à la viande avec une sauce d’oignon et des crudités).

L’enseignement n’avait pas été la première activité de Simon Guédé. Jeune chrétien, il explique : « j’ai été recruté comme secrétaire au curée de la paroisse de Sacré cœur en 1962, mais pour quelques mois. J’ai offert également mes services dans une armurerie du nom de Gambetta à l’époque ». Auparavant, il avait fait ses premiers pas à l’école élémentaire Lamoise, puis cap au collège de la petite côte et enfin à Saint Michel où il a décroché son brevet d’Etudes du premier cycle (Bepc).
Pensif, les yeux fixés sur un même endroit, il offre une vague de ressemblance à un grand père qui raconte ses beaux jours à ses petits enfants attentifs. Les images du passé semblent défiler sous ses yeux et c’est comme si une créature invisible lui dictait les souvenirs de sa tendre jeunesse

En 1978 Simon retourne auprès des siens à Fadiouth. Depuis cette date jusqu’en 1994, il  consacre tout son temps à inculquer le savoir à la jeune génération à l’école Joachim Fodé Ndiaye de Joal. Pour terminer en apothéose « en 2001, j’ai pris ma retraite pendant que j’étais surveillant au Lycée Léopold Sédar Senghor de Joal » narre –t-il. Mais aujourd’hui comme hier, le vieil homme affiche sa volonté de servir encore son pays. « Ma plus grande satisfaction morale demeure la réussite de plusieurs de mes élèves dans la vie : il y’ en a qui sont devenus des enseignants, des journalistes, des cadres supérieures et j’en passe » se réjouit-il

A la jeune génération, il ne cesse de prodiguer des conseils et affirme que  « ceux qui vivent, ce sont ceux qui luttent. Redoublez d’efforts pour réussir dans la vie, car il ne faut jamais se décourager ».


Mahamadou Lamine BARRO

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